Mana'o n° : 61/2025
Projet de loi du pays relative aux établissements publics de santé
Tōmite
Ea 'e auturura'a
Mana'o :
Mana'o färi'i 'ore
Hōro'ahia i te :
11/06/2025
'Āfa'i parau :
Maiana BAMBRIDGE
Avaiki TEUIAU

 

La Polynésie française est confrontée à des défis majeurs en matière de santé publique, tel que notamment le vieillissement de la population et l’augmentation des maladies chroniques. Ces évolutions exigent une meilleure coordination des soins, une adaptation des infrastructures et une prise en compte des avancées technologiques comme la télésanté. Actuellement, le cadre statutaire des structures hospitalières présente des rigidités administratives et un manque de synergies entre les secteurs public et privé. 

 

Pour répondre à ces enjeux, le projet de loi du pays propose la création d’EPS afin d’améliorer la gouvernance, renforcer l’attractivité des structures hospitalières, favoriser la complémentarité public-privé, développer la recherche et mutualiser les ressources via le GHPF.

 

Le CESEC estime que, bien que pertinent dans ses objectifs, ce projet de loi du pays est précipité et que plusieurs prérequis doivent être remplis avant sa mise en œuvre.

 

Une analyse capacitaire approfondie, intégrant le taux de fréquentation des services hospitaliers, est indispensable pour ajuster efficacement l'organisation du CHPF et des établissements périphériques, prévenir le gaspillage des ressources, et optimiser l'offre de soins face à la saturation actuelle et à la sous-utilisation des infrastructures. Par ailleurs, la préparation budgétaire reste incomplète et l’absence d’une stratégie rigoureuse pour moderniser les infrastructures et équipements médicaux risque de compromettre l’efficacité et la pérennité du dispositif.

 

Concernant l'organisation des EPS, le CESEC recommande de redéfinir les missions du CHPF, en le centrant sur les soins aigus et en optimisant la répartition des spécialités médicales, les structures spécialisées (PSM et ICPF) devant demeurer indépendantes dans leurs gestions.

 

Sur la gouvernance des EPS, il suggère de renforcer le rôle d’échanges et de concertation du conseil de surveillance, une meilleure représentativité des soignants et patients ainsi qu’une procédure de nomination du directoire moins politisée. Il met en garde contre une autonomie excessive des EPS qui pourrait fragmenter l’accès aux soins.

 

Quant à la mutualisation via le GHPF, l’institution considère que le rôle stratégique du GHPF demeure flou, la complémentarité public-privé doit être encadrée pour éviter une concurrence défavorable et qu’une meilleure planification budgétaire est essentielle pour assurer la viabilité du dispositif.

 

Le CESEC insiste également sur la nécessité d’améliorer le recrutement et la fidélisation des professionnels de santé en créant un statut spécifique et en renforçant les incitations pour maintenir les compétences localement. Il souligne également l’importance de revaloriser les dispensaires pour garantir un accès équitable aux soins.

 

L’institution considère que, bien qu’il repose sur des objectifs pertinents, ce projet de loi du pays ne peut être adopté en l’état, faute de préparation suffisante et de garanties sur son application. Il est impératif que les prérequis essentiels soient levés avant toute mise en œuvre, notamment en matière de structuration budgétaire, de gouvernance, de cadre statutaire pour le personnel hospitalier et de revalorisation des dispensaires.

 

Le CESEC appelle à une révision approfondie du projet de loi du pays intégrant les actes règlementaires d’application, en concertation avec les acteurs concernés, afin d’éviter une réforme précipitée qui pourrait compromettre l’efficacité du système hospitalier polynésien.

 

Enfin, s’agissant d’un projet transverse d’envergure, cela impliquera différentes structures, équipes ou domaines de compétences. L’objectif sera alors de réunir des points de vue divers et des expertises variées pour résoudre un problème ou réaliser une tâche spécifique. La sélection d'une équipe fortement impliquée, formée et compétente est indispensable pour porter le projet à son terme avec succès.

 

Par conséquent, tel que présenté, le Conseil économique, social, environnemental et culturel (CESEC) de la Polynésie française émet un avis défavorable au projet de loi du pays portant création des établissements publics de santé (EPS), tant que les prérequis essentiels ne sont pas levés.