Mana'o n° : 84/2025
Projet de loi du pays portant modification de la loi du pays n° 2017-16 du 18 juillet 2017 modifiée réglementant les activités professionnelles liées à la production et la commercialisation des produits perliers et nacriers en Polynésie française.
Tōmite
Imira'a faufa'a
Mana'o :
Mana'o fāri'i
Hōro'ahia i te :
30/12/2025
'Āfa'i parau :
Messieurs Makalio FOLITUU et Patrick GALENON

La perliculture constitue un pilier de l’économie de la Polynésie française, tant par son poids dans les exportations que par l’ensemble des activités qu’elle irrigue — producteurs d’huîtres perlières, producteurs de produits perliers, écloseries, négociants, bijoutiers, artisans, exportateurs et services associés.

 

 

Activité emblématique et fortement ancrée dans certains archipels, la perliculture consolide le tissu économique des îles éloignées et participe à l’image internationale du Pays à travers la perle de culture de Tahiti. 

Le projet de texte modifiant la loi du pays n° 2017-16 du 18 juillet 2017 propose une réforme d’ampleur visant à adapter le cadre réglementaire aux évolutions et besoins de la filière. Ces évolutions témoignent notamment d’une volonté de sécuriser l’approvisionnement en huîtres perlières, de mieux maîtriser les impacts environnementaux et de restaurer la valeur de la production polynésienne sur les marchés.

À l’issue de ses travaux et auditions, le CESEC formule les observations et recommandations suivantes :

  • le CESEC considère que la distinction entre milieu contrôlé et milieu naturel constitue une clarification réglementaire utile, mais qu’elle doit impérativement s’accompagner d’un encadrement rigoureux des capacités de production autorisées et des volumes introduits dans le lagon, afin de préserver un équilibre économique entre les producteurs d’huîtres perlières et les écloseries ;

 

 

  • le développement du milieu contrôlé doit s’inscrire dans une logique de complémentarité avec le milieu naturel, et non de substitution, en tenant compte des enjeux économiques, sociaux, territoriaux et environnementaux propres aux archipels producteurs ;

 

 

  • le CESEC recommande l’élaboration d’un schéma de développement concerté de la perliculture, permettant de fixer des objectifs clairs, partagés et évaluables, et de mieux articuler les réformes économiques, environnementales et sociales du secteur ;

 

 

  • il considère qu’un bilan global de l’application de la loi du pays n° 2017-16 du 18 juillet 2017 apparaît nécessaire, près de dix ans après son entrée en vigueur, afin d’évaluer l’efficacité réelle des outils de régulation et de gouvernance mis en place ;

 

 

  • s’agissant du pré-grossissement, le CESEC souligne le caractère sensible de cette phase, située à l’interface entre milieu contrôlé et milieu naturel, et recommande un encadrement strict fondé sur des seuils biologiques clairs (taille et durée), ainsi qu’une articulation équitable avec les plafonds de superficies et de production autorisés, afin d’éviter toute distorsion de concurrence ;

 

 

  • sur le plan environnemental, le CESEC rappelle que le développement des activités perlicoles doit être concilié avec la préservation durable des écosystèmes lagonaires ; il préconise un renforcement du suivi environnemental, de la production de connaissances scientifiques (fondamentales et appliquées) et de l’adaptation des règles de gestion aux spécificités de chaque lagon ;

 

 

  • il recommande de renforcer les obligations relatives à la remise en état des concessions à la cessation d’activité, notamment par la mise en place de mécanismes de garanties financières et de contrôles effectifs, afin de prévenir toute pollution durable des milieux lagonaires ;

  • concernant les transferts de naissains d’huîtres perlières, le CESEC appelle à une vigilance accrue, à une meilleure coordination entre les services compétents et à la mise en place d’un dispositif de biosécurité fondé sur des données scientifiques régulièrement actualisées ;

 

 

  • en matière de formation, le CESEC constate les progrès accomplis et souligne la nécessité de renforcer et structurer les parcours de formation et de qualification, en particulier pour les métiers à forte technicité tels que celui de greffeur ;

 

 

  • s’agissant de la commercialisation, le CESEC estime nécessaire de mieux articuler les exigences imposées en amont de la filière avec une stratégie collective de valorisation fondée sur la qualité, la traçabilité et la transparence, afin de restaurer durablement la valeur et l’image de la perle de culture de Tahiti sur les marchés internationaux ;

 

 

  • concernant l’interdiction des perles traitées, le CESEC soutient l’objectif de protection de l’image et de la réputation de la perle de culture de Tahiti, tout en recommandant une mise en œuvre juridiquement sécurisée, tenant compte des stocks existants et des risques contentieux, par la mise en place de mesures transitoires adaptées ;

  • le CESEC souligne l’importance de renforcer la cohérence et la crédibilité du dispositif de certification existant, de mieux différencier les catégories de produits perliers selon leurs caractéristiques et leur qualité, et d’engager, à moyen et long terme, une réflexion sur les modalités d’une reconnaissance internationale de la perle de culture de Tahiti, dans une perspective de valorisation très haut de gamme ;

 

 

  • Enfin, le CESEC préconise la mise en place d’une Appellation d’Origine Protégée (AOP) visant à sécuriser l’origine de la perle de culture Tahiti, combinée à un dispositif de certification et à un label culturel et éthique, permettant d’affirmer un positionnement résolument très haut de gamme sur les marchés internationaux.

     

     

Au regard de l’ensemble de ces éléments, le CESEC considère que le projet de loi constitue une étape importante dans l’évolution du cadre réglementaire de la perliculture, mais qu’il gagnera en efficacité s’il s’inscrit dans une vision stratégique globale, partagée et durable, conciliant développement économique, concertation des acteurs et protection des lagons polynésiens.

 

 

Sous réserves de la prise en compte des observations et recommandations qui précèdent, le CESEC émet un avis favorable au projet de loi du pays portant modification de la loi du pays n° 2017-16 du 18 juillet 2017 modifiée réglementant les activités professionnelles liées à la production et la commercialisation des produits perliers et nacriers en Polynésie française.